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jeudi 27 janvier 2011

ÉMEUTES PLACE BELLECOUR : DIX-HUIT PERSONNES PORTENT PLAINTE CONTRE X

Suite au blocage du pont de la Guillotière et de la place Bellecour par la police, les 20 et 21 octobre, dix-huit personnes ont déposé plainte contre X....

© Olivier Chassignole

Suite au blocage du pont de la Guillotière et de la place Bellecour par la police, les 20 et 21 octobre, dix-huit personnes ont déposé plainte contre X. Elles demandent au procureur l'ouverture d'une enquête quant aux conditions de "détention arbitraires et à ciel ouvert", pendant plusieurs heures, lors des manifestations contre la réforme du régime de retraite. Ces personnes sont soutenues par le ”Collectif 21 "Collectif 21", qui regroupe vingt-cinq organisations et lance un appel à témoins.

Le 21 janvier, le collectif 21 octobre a déposé plainte auprès du Tribunal de Grande Instance. Voilà ce que dit leur courrier, en substance.

Objet :
Faits du 21 octobre 2010
Sauvegarde des libertés fondamentales
Dépôt de plainte
Demandes d’investigations

Lyon, le 21 janvier 2011

Monsieur le Procureur de la République,

Les organisations signataires et certaines des personnes se trouvant sur les lieux ce jour-là portent plainte contre personnes non désignées et souhaitent obtenir les investigations nécessaires au sujet d’ « une garde à vue à ciel ouvert de plusieurs centaines de personnes » organisée le 21 octobre 2010, place Bellecour, à Lyon.

De nombreux témoignages nous interrogent sur la légalité de cette opération consistant à bloquer Place Bellecour toute circulation, entrée ou sortie, par la mise en place d’un cordon de forces de l’ordre disposé tout autour de cet espace, barrant le moindre accès.

Ce dispositif opérationnel de 13H30 à 19H30 environ a immobilisé, sans aucune distinction, environ un millier de personnes, dont des mineurs, dans le but manifeste de les retenir « préventivement », de leur interdire toute participation à la manifestation dont le départ était fixé en début d’après-midi place Antonin Poncet, et d’interdire également tout aller et venue.

L’ambiance du jour était calme. Aucune dégradation notable n’avait été commise ce jour-là, dans la matinée en particulier.
Pas une seule des personnes présentes n’a été interpellée pour avoir prévu en se rendant sur place de procéder à des dégradations ou de commettre quelque délit que ce soit.

Cependant, des centaines de personnes ont été retenues contre leur gré, gardées à vue sans arrêt par un hélicoptère surplombant à quelques dizaines de mètres les lieux, certaines étant d’ailleurs parfaitement étrangères à la manifestation en préparation.

Prises au piège pendant de très longues heures, exténuées, stressées, celles-ci ont fini par pouvoir sortir de ce dispositif non sans avoir été l’objet d’un contrôle d’identité, ou d’une vérification d’identité pour d’autres, d’une fouille et de photographies individuelles systématiques, lesquelles ont permis d’alimenter un fichier de police.

Cette privation grave des droits fondamentaux, interdiction d’aller et de venir, interdiction de manifester, a été décidée par le pouvoir exécutif et nous paraît absolument dénuée de motif légitime tant la mesure prise a été générale et grave alors que le risque de trouble n’était pas établi.

Sont ainsi regardés comme des actes arbitraires attentatoires à la liberté individuelle dans le cadre précité, la rétention durant plus de quatre heures, la non-présentation à un officier de police judiciaire, l’omission des avertissements relatifs aux droits des intéressés, les contrôles et vérifications d’identité, les prises de photographies individuelles non autorisées par un magistrat, la mise des renseignements sur fichier.

Ce dispositif policier extrêmement maîtrisé n’a à aucun moment été mis en difficulté par les personnes présentes et venues manifester. Ni arme, ni arme par destination, n’a été saisie.
Il paraît dérisoire de justifier l’emploi de la force par les gendarmes à l’encontre des manifestants en prétextant des jets de pierres, tout aussi inoffensifs que prévisibles. Pourtant les forces de l’ordre ont usé de flash-ball, de canons à eau, et de nombreuses grenades de gaz lacrymogène, semblant, de l’avis de nombreuses personnes présentes, « jouer » avec les personnes ainsi parquées et sans défense en provoquant des mouvements de foule d’un côté de la place vers un autre.

Les personnes prises au piège disent s’être senties particulièrement humiliées. Comment aurait-il pu en être autrement en étant à la merci des forces de l’ordre, pour une durée inconnue, prises par surprise dans une véritable souricière et sans en comprendre les motifs ?
Privées de toute information, parfois volontairement désinformées notamment par des annonces leur promettant une possibilité de sortie de l’autre côté de la place, privées des commodités d’hygiène élémentaire, de nourriture et d’eau, les personnes détenues ont vécu ces longues heures dans une ambiance particulièrement stressante.

Au cours de l’après-midi, les forces de sécurité ont procédé à plusieurs centaines d’exfiltrations au faciès.
Nombreux sont les témoins qui ont constaté les discriminations ainsi faites permettant à ces personnes de s’extraire du dispositif, les critères retenus n’ayant rien de légal : plutôt âgé, plutôt blanc.

Cette opération de police inacceptable, violente et sans justification nous paraît devoir revêtir diverses qualifications pénales. Les associations signataires se réservent de plus la possibilité de saisir la C.N.D.S et la C.N.I.L.

Aux termes de l’article 432-4 du Code pénal « Le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, agissant dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ou de sa mission, d'ordonner ou d'accomplir arbitrairement un acte attentatoire à la liberté individuelle est puni de sept ans d'emprisonnement et de 100000 euros d'amende.»
Aux termes de l’article 432-5 du Code pénal « Le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ayant eu connaissance, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ou de sa mission, d'une privation de liberté illégale, de s'abstenir volontairement soit d'y mettre fin si elle en a le pouvoir, soit, dans le cas contraire, de provoquer l'intervention d'une autorité compétente, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende (…).»
Les plaignants entendent également qu’il soit enquêté sur l’usage abusif de flash-ball, de canon à eau et de gaz lacrymogène contre les personnes retenues, parfaitement maîtrisées et ne présentant aucun risque car non armées tant pour les gendarmes que pour le dispositif lui-même.

Enfin, il sera investigué sur les discriminations opérées tout au long de cette longue après-midi par les forces de l’ordre permettant, au faciès, l’exfiltration de tel ou tel. Pendant que ceux-ci se voyaient refuser la sortie, d’autres, pour les raisons inverses, étaient autorisés à sortir. Aux termes de l’article 225-1 du Code pénal « Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur grossesse, de leur apparence physique, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs moeurs, de leur orientation sexuelle, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. » Aux termes de l’article 432-7 du Code précité,
« La discrimination définie à l'article 225-1, commise à l'égard d'une personne physique ou morale par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ou de sa mission, est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75000 euros d'amende lorsqu'elle consiste :
1° A refuser le bénéfice d'un droit accordé par la loi ; (...) ».

Au regard de l’ensemble de ces éléments, nous vous demandons de bien vouloir enquêter sur les faits dont il s’agit.

A cette fin, il nous paraît absolument indispensable de saisir l’ensemble des images réalisées par l’hélicoptère ce jour-là. Ce document permettra de cerner parfaitement la réalité de cette journée, de comprendre ce qui s’est très exactement passé, et de vérifier le cas échéant les accusations détaillées aux termes de la présente et de répondre aux légitimes interrogations des signataires.

Confiant dans l’attention que vous porterez à la présente,

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Procureur de la République, l’expression de nos salutations distinguées.

Les signataires

- 18 personnes physiques et les oragnsaitions suivantes :

- COVRA (Collectif Villeurbannais pour un Rassemblement Anti-libéral)
- Divercité (membre du Forum Social des Quartiers Populaires - FSQP)
- Coordination contre le Racisme et l’Islamophobie (CRI)
- MRAP
- Union Syndicale Solidaires Rhône
- RAS L’FRONT
- Comité Départemental Europe Ecologie Les Verts du Rhône,
- Planning Familial 69, (Mouvement Français pour le Planning Familial)
- Mouvement des Jeunes Communistes Français (MJCF)
- Parti Communiste Français
- Union Nationale Lycéenne (UNL)
- Union Nationale des Etudiants de France (UNEF)
- Les Alternatifs, fédération du Rhône
- FASE 69, Fédération pour une Alternative Sociale et Ecologique du Rhône
- SOS Racisme Rhône
- NPA 69, Nouveau Parti Anticapitaliste, section Rhône
- FCPE, Fédération des Conseils de Parents d’Elèves du Rhône
- ATTAC Rhône – (soutenue par Attac-France)
- GAUCHE UNITAIRE
- UD – CGT du Rhône
- GAUCHE ALTER LYON
- SAF, Syndicat des Avocats de France
- PARTI DE GAUCHE
- FSU (Fédération Syndicale Unitaire)
- LDH (Ligue des Droits de l’Homme)



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