Dans la manifestation des Chinois dimanche à Belleville. (© AFP Bertrand Langlois)
La manifestation devait rester pacifique, elle a dégénéré. Ils étaient des milliers de Chinois et d’Asiatiques à manifester (8500 selon la police) dimanche après-midi, dans le quartier parisien de Belleville, pour protester contre l’insécurité dont ils se disent victimes. Que s'est-il passé ?
La manifestation: les raisons de la colère
Selon les organisateurs, il s’agit de la plus importante manifestation de cette communauté jamais organisée en France. Ils protestaient contre l’insécurité dont ils se disent victimes et perpétrés, selon eux, par des groupes de jeunes vivant à Belleville ou dans d’autres quartiers de l’est parisien. «Il y a tout le temps des vols de sac, dans la rue. Des viols, aussi», expliquait une commerçante chinoise. «On est attaqué parce que les Chinois ont souvent du liquide sur eux, on est des cibles faciles», ajoute un habitant. Même pas la moitié vont porter plainte. Surtout à cause de la langue: beaucoup parlent mal français et n’osent pas se rendre au commissariat.»
Florence habite le 19e arrondissement, contigu à Belleville: «Cela fait des années que ça dure, depuis 2002. J’ai assisté plusieurs fois à des agressions, à des insultes, principalement de maghrébins contre des personnes d’origine chinoise. Trois fois, en 2003, j’ai appelé la police qui a refusé d’intervenir. Ça fait longtemps qu’ils sont au courant mais qu’ils ne font rien. J’ai vraiment la sensation d’une inertie.» Hier, le collectif réclamait «des actions concertées et coordonnées» des autorités pour renforcer la sécurité dans le quartier.
Dérapage
C’est à cause d’un vol de sac à main d’une femme dans le cortège que le rassemblement a dégénéré. D’après plusieurs témoignages, des manifestants chinois ont pris à partie les voleurs qui ont dû se réfugier dans le commissariat avec le sac, pour éviter le lynchage. Des échauffourées ont ensuite éclaté, vers 17 h 30. Trois personnes d’origine asiatique ont immédiatement été interpellées par la police. Les manifestants ont ensuite demandé à plusieurs reprises aux forces de l’ordre de les relâcher en scandant « libérez », les poings levés.
Les échauffourées
Les premiers incidents interviennent peu après le vol, vers 17 h 35, entre une cinquantaine de jeunes manifestants et de jeunes extérieurs au cortège, d’origine maghrébine et africaine. Jets de bouteilles, d’œufs, poubelles brûlées: des camions de CRS et de gendarmes investissent rapidement le quartier, à l’intersection du boulevard et de la rue Belleville. Des gaz lacrymogènes dissipent ensuite la foule. Après le départ en trombe des forces de l’ordre, sous les projectiles, un groupe renverse une voiture rue de Belleville et une auto banalisée de la police. La tension est palpable dans la rue: discussions houleuses, tensions communautaires. Rapidement, les gendarmes et CRS reviennent et doivent avoir recours aux gaz lacrymogènes. Peu après 20 heures, le dialogue entre les manifestants et les forces de l’ordre permet de calmer le jeu: ils promettent que les interpellés seront relâchés le lendemain. Après le départ des gendarmes mobiles, des petits groupes de manifestants déplacent des voitures garées afin de bloquer la circulation. Deux personnes sont même renversées par une auto. Nouvelle intervention. La dernière : à 22 heures, le calme revient.
Bilan
Trois policiers ont été blessés durant les affrontements. Au total, huit personnes ont été interpellées dimanche, cinq étaient encore en garde à vue hier soir. Les manifestants qui réclamaient des «des actions concertées et coordonnées», ont été entendu. «Nous sommes d’accord pour créer un comité de pilotage unique, explique le maire du 20e arrondissement, Frédérique Calandra. Il s’agit de simplifier la vie des ressortissants chinois, mieux prendre en compte leur demande.» Un projet qui réunirait les quatre arrondissements de Belleville (10, 11, 19 et 20e). La première séance de travail doit se tenir avant l’été.
Que s'est-il passé à Belleville ? - Libération
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