« On prenait un café devant la boutique quand ces jeunes sont descendus de leur autocar en criant “La France aux Français. Le Pen Président. A mort les noirs ou les Arabes. Heil Hitler”, en me regardant du coin de l’œil. Ils se sont jetés sur moi à cinq ou six et m’ont donné des coups de poing et de pied. Un boutonneux au crâne rasé me frappait en criant “On va niquer ta mère sale Arabe” », a raconté la victime au tribunal, selon Var-Matin.
Ce cuisinier de 25 ans a alors trouvé refuge dans la boutique, où un client l’a protégé. Alertés, les gendarmes ont intercepté le bus au péage de Fréjus et interpellé les agresseurs.
La victime « a pris des coups un peu partout », selon son avocate, Me Alexandra Granier. « Il est blessé au genou, des soins sont en cours, une expertise médicale doit avoir lieu. » Il a eu une interruption temporaire de travail (ITT) de 8 jours.
Quatre des prévenus ont été condamnés à 18 mois de prison, dont 15 mois avec sursis. Un mandat de dépôt a été prononcé à leur encontre.
Une cinquième militante, une retraitée âgée de 69 ans, était poursuivie pour avoir encouragé l’agresseur principal, un mineur qui sera jugé devant le tribunal pour enfants le 10 juin. Elle aurait crié : « La France aux Français, vas-y Manu, attaque », en agitant un drapeau tricolore. Elle a écopé de la même peine, mais sans mandat de dépôt.
Selon Var-Matin, elle a dit au tribunal être « un peu raciste, parce qu’à la différence des Asiatiques, les Arabes et les Noirs ne nous respectent pas, et parce qu’il existe des mosquées souterraines ». A l’issue du procès elle a affirmé qu’elle rendait sa carte du FN.
Reconnus coupables de violences avec les circonstances aggravantes de la réunion, de l’état d’ivresse et de l’appartenance réelle ou supposée de la victime à une race ou une religion, les quatre condamnés emprisonnés sont âgés de 20 à 25 ans. L’un se dit « responsable des jeunes partisans » du FN à Nice. Il est en fait responsable du FNJ dans les Alpes-Maritimes. Ils ont tous présenté leurs excuses à la victime et plaidé l’effet de groupe.
Plusieurs d’entre eux rêvent d’entrer dans l’armée.
« Vous voulez intégrer l’armée ? Mais elle n’a pas besoin de gens comme vous. Vous êtes le contraire des valeurs de la République », a estimé le Procureur, en dénonçant ce « groupe de nazillons caricatural qui débarque du bus en scandant des slogans nazis ». Il avait requis 18 mois de prison, dont 6 mois ferme.
Les prévenus ont surtout chargé le mineur, dénommé Manu. « Il n’aime pas les noirs ni les juifs, se dit néo-nazi mais n’assume pas », ont expliqué ses compagnons, selon Var-Matin, qui le décrit ainsi : « Couvert d’acné, le crâne rasé, chaussé de rangers, portant t-shirt et bretelles, avec 1,70 g/l d’alcoolémie due à la bière, celui-ci avait tout de la panoplie du skinhead. » Dans l’attente de son procès, il a été placé dans un centre éducatif fermé.
Du côté du FN, la secrétaire départementale des Alpes-Maritimes, Lydia Schenardi, affirme : « Mon mouvement ne cautionne absolument pas ces actes inadmissibles. Nous avons exclu les trois personnes qui appartiennent au Front national », les autres étant, selon la député européenne, des « sympathisants ».
« Je les connais, ils ont apporté leur contribution au Front national depuis des mois et se comportaient correctement, assure Lydia Schenardi, numéro deux sur la liste du FN dans le Sud-Est pour les élections européennes du 7 juin. Leur sanction est très lourde mais méritée. La démocratie, c’est la voie des urnes, certainement pas le coup de poing. Je ne veux absolument pas de personnes comme ça dans nos rangs. »
Quant à la militante âgée de 69 ans, Lydia Schenardi estime que son cas « tient de la psychiatrie ».
Pour Bruno Ligonie, secrétaire départemental adjoint, « ils avaient un peu trop bu à table, étaient chauds, contents d’avoir vu Le Pen. Ils se sont laissés déborder par un effet de groupe. C’est une imbécillité, c’est débile. »
Tout le groupe avait assisté au « banquet patriotique » donné dimanche midi par Jean-Marie Le Pen à Marseille, au cours duquel le leader FN avait ressassé ses rengaines habituelles, notamment sur l’immigration.
M.H.
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