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vendredi 15 janvier 2010

Peillon avait prévenu Aubry 48 heures avant son faux bond à France 2 - Libération

L'eurodéputé PS a laissé en plan Arlette Chabot en plein débat Besson-Le Pen sur l'identité nationale, pour «que ça fasse un peu scandale». La chaîne fustige une «méthode de voyou» et défend sa présentatrice. Aubry apporte son soutien au socialiste

Vincent Peillon.


Vincent Peillon. (© AFP Jeff Pachoud)

Joli coup ou reculade de dernière minute? En plantant Arlette Chabot, hier soir sur France 2, voyant dans les conditions d’organisation de l’émission «une dérive indigne et inacceptable», le socialiste Vincent Peillon a, en tout cas, réussi à voler la vedette aux deux contradicteurs présents, Eric Besson et Marine Le Pen. Et à mettre une belle pagaille. Furieuse, la rédaction de France 2 s’emporte contre des «méthodes de voyou» et défend sa présentatrice. Les Le Pen, père et fille, s’en mêlent. L’UMP aussi, qui accuse les socialistes de «fuir le débat».

L’eurodéputé (PS) a, de son côté, tranquillement expliqué que son lapin, par communiqué, avait été préparé «depuis longtemps», avec l’intention de saboter l’émission et provoquer «un incident».

Il avait d’ailleurs prévenu, «il y a 48 heures, par correction», la patronne du PS, Martine Aubry, de son intention de décommander le débat. «Je voulais l’informer de ce que j’allais faire, ce qui me semblait normal», a justifié l’eurodéputé sur France-Info.

Aubry le soutient «pleinement»

Celle-ci a assuré, en retour, qu’elle soutenait «pleinement» la décision de Peillon: Il «souhaitait pouvoir dire ce qu’est vraiment l’identité nationale pour nous, (...) et puis, il a découvert que ce débat avait d’abord lieu entre Eric Besson et Mme Le Pen et qu’il était relégué en deuxième partie, raconte la dirigeante socialiste. On ne peut pas l’inviter à un débat et ensuite le reléguer après une mise en scène d’un ministre qu’on veut essayer de réhabiliter par rapport au Front national. Ce n’est pas digne d’une télévision publique.»

Sur RMC-BFM TV, Peillon estime, par ailleurs, que,«si on n’attire pas fortement l’attention sur les choses, les choses ne se font pas. Si j’avais annoncé plus tôt ma décision que j’avais prise depuis longtemps, alors on aurait peut-être trouvé un remplaçant, il y en a toujours un pour venir à la télévision, et on aurait refait l’émission autrement», raconte-t-il

«Des moyens d’entrer en résistance»

«Je n’y ai pas réfléchi seul, précise Peillon. Il y a des moments où il faut trouver des moyens de se faire entendre et des moyens d’entrer en résistance, je pense qu’on en est là.»

«Je mesurais bien que c’est une chose pas facile de s’affronter» au service public, a-t-il ajouté sur France Info, conscient qu’il aurait désormais «peu d’invitations» sur France-Télévision. Selon lui, «un piège était tendu depuis le début : l’idée était de faire le grand match Besson-Le Pen parce que ça fait de l’audimat.»

Patrick Mennucci, membre du courant de l’eurodéputé L’Espoir à gauche, applaudit: «Je félicite Vincent Peillon de son attitude ce soir. [...] En refusant de cautionner [ce] débat nauséabond, il frappe un grand coup pour réclamer la fin de l’instrumentalisation de la peur de l’autre par le pouvoir sarkozyste.»

Alors que le socialiste réclamait hier la démission d’«Arlette Chabot et des dirigeants de France 2 qui ont autorisé cette opération», la direction de France Télévisions a rappelé «son entière confiance» à sa directrice générale adjointe chargée de l’information, et dénoncé «une méthode de voyou» de la part de Peillon.

«Faux prétexte»

Des «méthodes scandaleuses», renchérit ce matin la vice-présidente du Front national, Marine Le Pen. «Quand je suis sortie du débat, évidemment un certain nombre de personnes étaient extrêmement en colère, je les comprends», s’énerve-t-elle sur RMC et BFM-TV. D’après la frontiste, Peillon avait «envoyé un mail le matin même pour confirmer sa venue et pour demander à ce qu’on fasse de la publicité à son livre». «Non seulement, il avait accepté mais c’est à lui qu’on a demandé s’il voulait passer en première partie de soirée ou en deuxième, reprend Le Pen. Le problème, c’est que ces gens ne sont pas des démocrates.»

Le Pen n’est pas en reste, convaincu que Peillon a avancé un «faux prétexte» pour mieux se défiler: «Il ne voulait pas discuter peut-être avec le traître», croit-il savoir. Invité de Sud radio, le leader d’extrême droite préfère s’en prendre au ministre de l’Immigration et de l’Identité nationale, transfuge du PS: «Il ne faut pas oublier qu’il a quitté en pleine campagne électorale la candidate socialiste (lors de la présidentielle de 2007): il est passé à l’ennemi avec armes et bagages, dans le code militaire en général c’était la mort.»

Le porte-parole de l’UMP, Frédéric Lefebvre, lui, n’a pas voulu rater cette occasion de s’en prendre au PS, trouvant «regrettable qu’une fois de plus le parti socialiste fuit le débat»: «La fuite de M.Peillon le jour même où le PS a déposé sa proposition de loi sur le droit de vote des étrangers en dit long sur sa difficulté à assumer publiquement devant des millions de Francais la manipulation qu’il a montée pour séduire l’extrême gauche et exciter l’extrême droite», argumente-t-il.


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