SOS Racisme Partenaire de Quat'rues

jeudi 29 janvier 2009

Procès du meurtrier de Chaib Zehaf : Compte rendu de la 3ème journée

Procès d'Oullins : la cour se pose la question du racisme

La cour d'assises du Rhône se posera finalement la question du mobile racisme, dans le meurtre commis à Oullins le 4 mars 2006 à Oullins. Jean-Marie Garcia (41 ans) avait exécuté Chaïb Zéhaf, 40 ans, à la sortie d'un bar. Le mobile n'a jamais été clair, mais l'instruction avait écarté la piste du racisme. Pour que la question trouve une réponse, Jean-Olivier Viout, procureur général de Lyon, a demandé hier à la cour d'ajouter à ses délibération la question spéciale du mobile raciste. « Il faut, confiait-il dès hier matin, que cette question soit purgée. La famille, le quartier, ne peuvent repartir avec le sentiment que la Justice a écarté la question. » Le président, Georges Cathelin, a décidé que la question serait effectivement posée aux jurés. Elle rôdait depuis lundi à longueur d'audiences...

Les trois premiers jours de débats ont sans doute écarté l'hypothèse d'un racisme conscient, assumé, idéologique. La plupart des charges se sont effondrées, laissant la cour face à une thèse plus complexe, celle d'un racisme refoulé (Libération de lundi). Deux témoins qui rapportaient des propos racistes attribués au meurtrier ont été malmenés à la barre. Le premier a exaspéré les magistrats en disant par exemple que si « les flics » n'avaient pas entendu, le 4 mars 2006, ces insultes, c'est qu'ils avaient « les oreilles bouchées ». L'autre témoin, plus respectueux mais impressionné, a répété ce qu'il dit avoir entendu : « Sale Arabe, sale race de merde ». Les avocats des parties civiles semblaient cependant elles-mêmes ébranlés par la faiblesse des témoignages.

Yves Sauvayre, défenseur de plusieurs proches de la Chaïb Zéhaf, se dit convaincu que le mobile est raciste, mais les preuves manquantes. Selon lui, l'auteur n'aurait pas tiré s'il ne s'était pas trouvé en face d'un homme d'origine maghrébine. Une thèse que soutiennent les autres avocats, et que Dominique Sopo, président de SOS Racisme, a complété ainsi : « Nous restons confrontés à l'absence d'alibi. Monsieur Garcia dit qu'il a tiré parce qu'il a eu peur. Mais pourquoi a-t-il peur en voyant deux personnes approcher ? Est-ce qu'on n'est pas confronté ici à tout le poids des préjugés qui font que l'on a peur en voyant approcher des hommes d'origine maghrébine? »

A un psychiatre qui avait rencontré Jean-Marie Garcia durant l'instruction, les avocats ont demandé son avis sur cette hypothèse d'un racisme refoulé. « Peut-être, a-t-il répondu dans un sourire, que nous refoulons tous des sentiments racistes. L'important, c'est que nous les refoulions. » Puis il a ajouté, plus grave: « Peut-être aussi que la violence s'exerce plus facilement sur des personnes différentes ».

Jean-Marie Garcia affirme qu'il a toujours vécu entouré de personnes de toutes origines. « Il est prêt à prendre vingt ans, pas à assumer qu'on le traite de raciste », dit Hervé Bambanaste, l'un de ses avocats, tandis que le second, Frédéric Lalliard, ajoute qu'il « porte comme un fardeau cette accusation de racisme ». Jean-Marie Garcia l'a répété plusieurs fois : « Je suis coupable d'homicide, oui. Mais pas de racisme, ni d'injures racistes. C'est impossible et tout le monde le sait. Tout le monde le sait ! ».

Bernard-Henri Lévy (actionnaire de Libération), cité à témoigner, a replacé tout cela, hier, dans une perspective générale. Trop au goût des avocats de la défense. « Est-ce qu'un crime peut-être qualifié de raciste lorsque son auteur n'appartient pas à une organisation casquée et que son geste est commis dans la dénégation du racisme ? », s'est-il demandé. Avant de répondre par l'affirmative, ajoutant que d'emblée, il avait eu le sentiment que « cet homme n'aurait pas tué » si sa victime « ne s'était pas appelé Monsieur Zéhaf, s'il n'avait pas ces origines-là ». Alors, coupable, forcément coupable, Jean-Marie Garcia ? Bernard-Henri Lévy répond que pour la société française, il importe en tout cas que la question soit posée, et que les jurés y répondent. C'est ce qu'a décidé la cour, qui se posera également, à la demande du procureur général, une autre question supplémentaire. Celle de la « concomitance » du meurtre et de la tentative de meurtre commise sur le cousin de Chaïb Zéhaf. Une subtilités juridique qui a pour Jean-Marie Garcia cette conséquence immédiate qu'il ne risque plus trente ans de prison, mais la perpétuité. Le verdict est attendu vendredi. Olivier BERTRAND pour Libélyon

Le racisme plane sur le procès Garcia
Cette question sera finalement examinée par les jurés de la cour d’assises du Rhône.

Crime raciste ou non ? Cette question sera finalement examinée par les jurés de la cour d’assises du Rhône qui jugent Jean-Marie Garcia. Une demande du parquet général après l’audition hier du très médiatique Bernard-Henri Lévy.

Le 30 mars 2006, quelques jours après le meurtre de Chaïb Zehaf, BHL écrit un article dans Le Point où il fait le rapprochement avec le rapt et la mort d’Ilan Halimi. Pour le philosophe, “ne pas poser la question du racisme serait un déni de justice”. “Comment se fait-il que Jean-Marie Garcia ait tiré sur Chaïb Zehaf mais pas sur les policiers, ni sur un autre client du bar ?” constate Bernard-Henri Lévy. Un seul témoin affirme avoir entendu des insultes racistes et aucune preuve attestant du racisme de Jean-Marie Garcia n’a été retenue mais, pour le philosophe, “le déni est le propre du crime raciste car il est rare qu’un raciste s’avoue raciste”.

“Emballement médiatique”

Une théorie qui irrite la défense. Maître Hervé Ban­banaste critique “un intellectuel qui ne connaît pas le dossier”. “La lutte antiraciste a besoin de certitudes. Je crains que l’emballement médiatique ne conduise à une condamnation sans preuve” commente-t-il. Le verdict est attendu demain. Metro France

BHL cité comme témoin aux assises pour le meurtre de Chaïb Zehaf
L'écrivain Bernard-Henri Lévy (BHL), cité mercredi comme témoin par les avocats de la famille de Chaïb Zehaf, dont le meurtrier présumé est jugé cette semaine par la cour d'assises du Rhône, a estimé que "ne pas poser la question" du mobile raciste serait "un déni de justice".

"Ce que je sais, ce que je crois, c'est que pour les proches, pour le quartier d'où venait Chaïb Zehaf, pour la société française, il est très important que la question soit posée. Si elle ne l'était pas, ce serait un déni de justice", a expliqué M. Lévy à la barre.

Le 4 mars 2006, devant une brasserie d'Oullins, dans la banlieue de Lyon, où ils avaient tous passé la soirée, Jean-Marie Garcia avait tiré à trois reprises sur Chaïb Zehaf, dont une fois "à bout touchant appuyé" sur le sommet du crâne, selon les experts.

Me Frédéric Lalliard, l'un des deux avocats de la défense, a d'ailleurs précisé quelques minutes plus tard au témoin qu'il ne s'opposait pas à ce que la question soit posée au cours du délibéré.

Abordant l'absence d'éléments permettant de prouver que l'accusé, Jean-Marie Garcia, est raciste, le philosophe a estimé que la question du racisme "doit être déconnectée de la question de la preuve, car il est rare que le raciste dise +oui, j'ai fait ça par racisme+".

"Qu'est ce qui fait que dans un bar, où l'assistance est mélangée, il tire dans le plafond, que, quand des policiers en civil l'interpellent, il ne tire pas, mais que quand il a le visage de Chaïb Zehaf en face de lui, il tire, il tire encore, avec acharnement ?", s'est-il encore interrogé.

Evoquant, à la demande des avocats de la partie civile, des propos tenus par M. Garcia lors des expertises psychiatriques sur les victimes, les qualifiant de "racailles, de scorpions", Bernard-Henry Lévy a estimé que ces termes constituaient "une verbalisation" du racisme de l'accusé : "ils appartiennent au lexique du racisme, celui de la zoologie et de la stigmatisation".

Dominique Sopo, président de SOS Racisme, également cité par les parties civiles, lui a succédé à la barre.

"Il reste un angle mort dans cette affaire, c'est celle du mobile", a-t-il souligné. "M. Garcia évoque sa peur face aux deux victimes, mais il faudra qu'il explique comment on peut avoir peur d'un homme à terre et d'un qui prend la fuite", a-t-il ajouté.

Selon les témoins et les experts, l'accusé a tiré au moins à une reprise sur Chaïb Zehaf alors que celui-ci était allongé, et son cousin a été atteint par une balle venant de derrière.

La justice a retenu la thèse d'une querelle ayant dégénéré dans un contexte de fin de beuverie, l'accusé affichant 2,39 grammes par litre de sang peu après les faits, et la victime 2,1g, même si aucun motif de querelle n'a été mis en évidence. Réquisitions et plaidoiries sont attendues jeudi.

AFP

Pour en savoir plus :

Lyon Mag : Procès Chaïb Zehaf : écarter la thèse du racisme serait "un déni de justice" pour BHL
- Procès de Jean-Marie Garcia : BHL enflamme les débats
20 minutes : Leçon sur le racisme, par BHL
Lyon Cap : BHL : "Ne pas poser la question du racisme serait un déni de justice"

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire